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Un apparent paradoxe : comment l’émotion–épisode de courte durée–suscitée par une publicité peut-elle influencer une décision d’achat qui sera prise bien plus tard ?
C’est une question que plusieurs de mes étudiants m’ont posée dans le cadre de mes enseignements de neuromarketing. Cette question a du sens. L’émotion fait vendre. Or l’émotion est définie comme correspondant à un épisode de courte durée. Dès lors, comment une publicité qui génère une émotion qui ne durera que quelques instants peut-elle favoriser un achat bien à distance de cet épisode ?
Pour tenter de répondre à cet apparent paradoxe, il faut se pencher un instant sur ce que représente une émotion et sur le fonctionnement de notre mémoire. L’épisode émotionnel occasionné par une publicité va générer une réponse corporelle à de multiples niveaux. L’état du corps qui en résulte constituera un stimulus interne qui sera perçu par le cerveau, au même titre que tout autre stimulus externe vu ou entendu au même moment.
Ainsi, tous les éléments contenus dans la publicité (visuels et auditifs pour une pub TV) que nous percevons constitueront des stimuli pour notre cerveau, au même titre que les stimuli internes l’informant de l’état de notre corps. Des éléments contextuels présents au même moment, tels que notre position dans la pièce, la présence du chien, le verre de bière dans notre main… s’ajouteront à cette liste. L’ensemble des informations perçues sera « encodé » par le cerveau de façon automatique, ne nécessitant aucun effort.
Cet encodage créera des patterns d’activité neuronale qui seront associés les uns aux autres et ces associations constitueront in fine la trace en mémoire laissée par l’évènement vécu. Cette trace reliera donc entre eux les patterns d’activité neuronale correspondant à la forme du produit et de son packaging, au nom de la marque ou du produit, à l’éventuelle égérie, à tout autre élément perçu ou entendu dans la publicité, mais aussi à la présence du chien, au verre de bière… ainsi qu’à l’état de notre corps. Il s’agit d’une trace en « mémoire à long terme », qui pourra persister dans notre mémoire des jours des semaines, des mois, voire des années.
La trace laissée dans notre mémoire par la perception de cette publicité pourra donc être réactivée bien à distance de la perception de la publicité. Il est probable que cette réactivation se fasse suite au fait qu’une composante de la trace soit réactivée par un objet perçu ou imaginé. L’activation de cette composante sera alors susceptible de réactiver toutes les autres composantes de la trace avec lesquelles elle était associée, y compris celle correspondant à l’état de notre corps au moment de la perception de la publicité. L’émotion suscitée par la publicité pourra donc être « ressentie » à nouveau, même en l’absence de la publicité elle-même. Cette dernière exercera donc un effet sur votre prise de décision et sur la décision d’achat bien au-delà de l’épisode émotionnel qui aura été généré au moment de sa perception. Enfin, toute perception additionnelle de la même publicité entre sa première occurrence et le moment présent aura pu réactiver, renforcer, modifier et enrichir la trace initiale qu’elle aura laissée dans notre mémoire.
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